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Les hypnothérapeutes : magiciens ou imposteurs ?

Je suis hypnothérapeute, je change les gens, enfin, c’est ce qu’on m’a dit

« Et… DORS ! »

Alors que je regarde cet inconnu fermer les yeux et me tomber dans les bras comme une pierre, je n’imagine pas une seule seconde le chemin qui vient de se dessiner devant moi. C’était il y a 8 ans, avec mon premier volontaire pour une séance d’hypnose de rue.

Quand une de tes croyances explose en plein vol…

Moi qui croyais depuis toujours à une vaste blague savamment orchestrée par des intermittents du spectacle pas assez doués en magie, je vivais ce jour-là une des plus belles dissonances cognitives de ma vie : « l’hypnose ça marche vraiment alors ? »

« Allons sauvez le monde. » (Ou au moins gagner de quoi payer le loyer.)

Des années plus tard, comme beaucoup d’hypnothérapeutes, de praticiens en hypnose, ou encore d’hypnologues (hypnologue ? sérieusement ?), j’écume les formations, reçois mes premiers clients dans un mélange de peur et d’excitation (le ficus, à côté ou derrière le fauteuil PÖANG d’Ikéa ?), puis m’installe progressivement dans une routine pavée de petites croyances bien confortables. La pire de toutes : l’hypnose permet de changer facilement et rapidement.

Evidemment que je m’habille comme ça, je fais de l’hypnose !

Non mais tu comprends, je suis thérapeute moi !

De temps en temps, je lis un livre de développement personnel (enfin, je le commence et je le pose sur ma pile des autres livres « lus »), histoire d’avoir l’impression d’avancer car je me dois d’être un être humain parfait pour accompagner les autres êtres humains qui voudraient le devenir. Blablabla, c’est ça, cause toujours…

Si Laurent Voulzy avait été aussi hypno, il aurait sûrement chanté ce genre de niaiseries : « Changer le monde, changer les choses, avec des bouquets d’hypnose.
La guerre au vent, l’amour devant, en étant bienveillant… »

Le changement c’est maintenant !

Pas forcément pour mes clients…

Le temps passe et je ressors peu à peu de mon cabinet avec une étrange impression : je n’en peux plus d’entendre les gens se plaindre ! Ça me hérisse le poil à chaque fois que j’entends « les autres veulent que je… » ou encore « mes parents m’ont fait comme ça donc… ». Mais ils veulent tous « changer », ça ils en sont sûr ! C’est leur projet de changer « grâce » à un hypnothérapeute !  

Plus ça va et moins je suis « patient » avec mes clients : belle ironie n’est-ce pas ?

« Ce que je veux » (c’est vous qui allez le faire pour moi)

Et si changer profondément n’avait juste rien à voir avec l’hypnose ?

  • « Je veux perdre du poids !»
  • « Je veux arrêter de fumer »
  • « Je veux mieux dormir ! »
  • « Je veux être plus performant ! »
  • « Je veux aller mieux ! ».

Le point commun à toutes ces problématiques : « Je veux changer ! ».

« Ok, alors fais le ! Change ! Quand on veut, on peut ! » diraient certains à raison. Mais qu’est-ce qui fait que certaines personnes arrivent à changer et d’autres non : la profondeur de l’hypnose, la technique, le protocole, la métaphore utilisée, le style du thérapeute ?

Lorsque je parcours les forums et autres groupes de « professionnels » de l’hypnose je suis stupéfié par l’énergie dépensée par ces derniers pour comprendre et aider leurs clients. Au final, on passe notre temps à projeter sur les autres ce que l’on croit comprendre et les solutions qui nous paraissent les meilleures pour eux.

Qu’est-ce qui nous pousse à changer ? Ou pas…

Ce que je trouve vraiment intéressant dans les demandes de nos clients (et dans les nôtres) ce n’est pas le « Je veux changer » mais le « parce que » qui vient derrière. « Je veux changer parce que ça ferait plaisir à ma femme. » n’est pas le même « je veux changer » que celui suivi par « parce que je n’en peux plus d’être comme ça !». Même à l’écrit, vous pouvez vous rendre compte sans trop d’efforts que ces deux phrases n’ont pas la même dimension émotionnelle. Évidemment, la plupart du temps, le « parce que » n’est pas conscient et il va falloir aller le chercher.

Hypnose : la fabrique à miracles aussi (in)efficace que les autres

Je veux un miracle tout de suite et puis c’est tout !

Dans son livre « Miracle Morning » Hal Elrod vente les bienfaits exceptionnels de sa méthode : suivez les routines matinales de ce livre et vous deviendrez riche, beau, en bonne santé et tout ça pour 16,95€ seulement chez Amazon. Mais cette méthode est-elle vraiment aussi miraculeuse qu’il le prétend ? Pour lui, c’est sûr ! Pour le reste du monde, pas plus que celle d’un autre livre de développement personnel, que l’hypnothérapie, ou que les conseils de votre meilleur pote autour d’une pinte de Kilkenny. Car ces méthodes, bien qu’elles paraissent magiques, présupposent presque toujours des promesses autour du « Je veux » et rarement sur le « Parce que ». À l’image du site Internet d’un hypnothérapeute, toutes ces méthodes vendent du changement clé en main présupposant la plupart du temps une absence d’effort de la part du client.

Pourtant en évoquant les épreuves difficiles qu’il a traversé avant d’écrire son livre, Hal Elrod donne la vraie clé de son bouquin dans les toutes premières pages (et ce n’est pas la promesse en 4e de couverture « Levez-vous tôt pour changer de vie. »). Il cite Anthony Robbins pour illustrer ce qui l’a amené à mettre en place des routines pour changer :

 « Pour opérer des changements dans votre vie, vous avez besoin d’inspiration ou de désespoir. »


Anthony Robbins

Aurait-il quand même pu changer sans ces routines ? Je pense que oui. Aurait-il pu changer à ce point sans passer à côté de la mort ? Je suis presque sûr que non.

Aucun changement possible sans émotion

La citation de Robbins à elle seule résume tout ! Le livre de l’ami Hal, les livres de développement personnel en général, les thérapies, vous, moi et même les conseils de votre mère : On ne change pas seulement parce qu’on le veut ou qu’on le doit, on change parce que notre « parce que » devient plus fort que notre « je veux ».

Et quand je dis « plus fort » je parle au niveau émotionnel : si la raison, l’intellect, étaient suffisants, ce pv de stationnement qui prend la poussière sur mon bureau n’aurait pas été majoré pour avoir dépassé le délai de paiement.
 
Qu’elles nous attirent vers un but ou qu’elles nous fassent fuir dans une autre direction, les émotions sont les seules au final qui nous font bouger vraiment et sur le long terme. En permanence nos émotions nous envoient des messages et nous sommes les seuls responsables de ce que l’on fait de ces informations. Après, est-ce que l’hypnose permet d’atteindre les émotions ou est-ce que les émotions permettent d’atteindre un état d’hypnose, je vous laisse vous faire votre propre avis et je serai ravi de vous lire à ce sujet dans les commentaires…

Peur, Colère, Tristesse, Dégoût. Les émotions qui nous font bouger !

Aller chercher l’énergie de son client au bon endroit

Quand un client vient dans mon cabinet pour arrêter de fumer, perdre du poids ou aller de l’avant dans sa vie, je peux maintenant prévoir sans trop me tromper s’il pourrait y arriver facilement ou pas. Son « parce que », sa motivation profonde, résonne dans ses mots et dans tout son corps. C’est bien pour ça que je ne fais pas de détermination d’objectif en séance, ça reviendrait à me concentrer sur le « Je veux », sur l’objectif. Son objectif il a déjà dû le tordre dans sa tête des millions de fois, alors je me dis que je vais éviter de lui faire payer une séance pour continuer avec lui ce qu’il faisait déjà très bien tout seul.

Je ne pense pas que l’hypnose change les gens.

Pour moi, c’est le « parce que » du client qui génère l’émotion nécessaire pour le transformer. Alors je m’attache à permettre à mon client d’identifier sa source émotionnelle qui lui fournira l’énergie nécessaire à son changement. Je ne sais même pas si je fais encore de l’hypnose finalement… ou alors pour la forme (il a quand même payé 80€ pour voir sa main se lever toute seule donc si ça lui fait plaisir…).

Choisir le « parce que » qui mérite que l’on se batte

En moins d’un an, j’ai eu deux « parce que » qui m’ont fait changer (et qui continuent à le faire profondément). Le premier « parce que » est arrivé avec un nez cassé, c’était la fin du monde à ce moment là ! Le deuxième « parce que » est arrivé quelques mois plus tard avec le rêve de toute une vie brisé en un seul coup de téléphone. Putain, qu’est-ce que c’était bien d’avoir le nez cassé finalement.

Si le changement nous est dicté par la raison, c’est probablement que les raisons ne sont pas suffisantes pour qu’il se mette réellement en place. On change quand on n’a pas le choix de changer, on le sait, on le sent profondément à l’intérieur, il n’y a aucun doute possible sur l’issue de nos efforts. Quoi qu’il arrive, peu importe le temps que ça prendra, on sait qu’il n’y a pas d’échappatoire possible pour parvenir à créer notre propre miracle. Pour survivre, on s’adapte.

Et vous ? Quel est votre « parce que » ? Qu’est-ce qui est à l’origine de vos plus gros changements de vie ? Votre métier par exemple n’est-il pas lié à un de ces « parce que » ?

« Tes combats conditionnent tes réussites » – Mark Manson –

Dans son livre « L’art subtil de s’en foutre. » Mark Manson exprime bien les problématiques que les hypnothérapeutes rencontrent tous les jours en cabinet avec leurs clients :

« La vérité c’est que je pensais vouloir quelque chose que je ne voulais pas en réalité, fin de l’histoire. Je voulais la récompense, et pas les efforts. Je désirais non le combat mais la victoire uniquement. Et la vie ça ne marche pas comme ça, jamais. Pour savoir qui tu es, tu dois savoir pour quoi tu es prêt à te battre. »

Mark Manson

Une personne change autant qu’elle est prête à endurer la souffrance nécessaire à ce changement. Soit elle sait, ressent, pour quelle raison elle se bat, soit on l’a aidée au cours de la thérapie à trouver cette raison émotionnelle profonde.

Finalement, un client qui se plaint de ne pas y arriver, ce client fainéant qui ne semble pas se bouger, il est peut-être juste encore en train de chercher son vrai combat, celui qui lui permettra de créer tout seul son miracle, peu importe le temps que ça lui prendra…

« Parce que même les miracles prennent un peu de temps… »

Il était une fois un imposteur

Un épouvantail qui voulait un cerveau, un lion qui désirait du courage et un homme de fer qui souhaitait avoir du cœur voulaient rencontrer le fameux Magicien d’Oz dont tout le monde parlait (il avait probablement de bons avis sur sa fiche Google). Ils étaient sûrs qu’IL avait la solution à leurs problèmes.

Comme ce magicien j’utilise des astuces qui paraissent magiques aux non initiés, comme ce magicien je ne suis qu’un simple être humain sans pouvoirs et comme avec ce magicien les gens croient qu’ils obtiendront ce qu’ils sont venus chercher grâce à moi.

Au final, le Magicien d’Oz n’a pas donné à ces trois personnages ce qu’ils désiraient le plus au monde. Ils l’ont gagné eux même en parcourant le chemin de briques jaunes qui menait jusqu’à lui. Il a juste été là, au bout du chemin, pour leur permettre de prendre conscience qu’ils avaient déjà un cerveau, un cœur et beaucoup de courage.

Comme le magicien d’Oz je suis un imposteur… et c’est une des choses dont je suis le plus fier quand je vois mes clients prendre conscience de leur capacité à penser, aimer et affronter la vie avec courage.

Sleepy

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